falaise-de-rocamadour


 
La cité médiévale de Rocamadour
et les restaurations des sanctuaires au XIXe siècle

 
ROCAMADOUR
 
 
Rocamadour au XIXe siècle
Les restaurations des sanctuaires (1858-1872)
 
 
Templiers à Rocamadour dans le Lot en Quercy
 
 
 
Origines du sanctuaire
de Rocamadour
 
Cobra dressé à l’entrée du sanctuaire
 
 
Les sculptures sur la falaise sont la clé des origines de Rocamadour
 
 
 
ARCHÉOLOGIE
 
La falaise de Rocamadour,
un écrin fragilisé et non protégé
 
Chapiteau de colonne palmiforme
 
Un patrimoine archéologique
et historique sans équivalence
en France et en Europe
 
 
Étude archéologique des sculptures sur la falaise
de Rocamadour
 
 
 
Les purges de la falaise

 
Une lente et méthodique destruction du patrimoine
 
Les purges de la falaise
 
Vestiges archéologiques et témoignages historiques arrachés à la falaise.
 
 
Il y a des silences
coupables et
des silences troublants
 
 
 
HISTOIRE & PATRIMOINE
de ROCAMADOUR

 
 
Armorial de Rocamadour
 
 
Armoiries et Seigneurie
de Rocamadour
 
 



I - Les archives municiales pour le XIXe siècle
 
les archives municipales de Rocamadour pour le XIXe siècle ont été
détruites volontairement... dans des circonstances tout à fait mystérieuses.
 "  Jean Rocacher
 
Jean Rocacher (1) écrit dans « Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour » paru en 1987 (2) p. 11 :
 
« Disons-le clairement pour ne pas avoir à le répéter au long de ce dossier : nos informations seront souvent lacunaires parce que la quasi-totalité des archives municipales de Rocamadour pour le XIXe siècle ont été détruites volontairement dans les toutes premières années du XXe siècle dans des circonstances tout à fait mystérieuses. »
 
II - Les restaurations des sanctuaires au XIXe siècle
 
Les tailleurs de pierre
 
La carte postale du tout début des années 1900 ci-dessous, montre des tailleurs de pierre à l’ouvrage sur la place devant la Porte du Figuier qui marque l’entrée du village de Rocamadour.


Rocamadour - L’arrivée  

 
Une pierre met plusieurs millions d’années à se former et il ne faudra au tailleur de pierre pour la transformer que quelques jours à quelques semaines selon la complexité de la forme à obtenir.
 
Les sculpteurs
 
De la rencontre entre le minéral et l’être humain un lien va s’établir. Le toucher est indispensable. Au contact de la pierre, le sculpteur ne se contente pas de lui donner une forme géométrique. S’il est sincère, il va laisser son cœur parler et s’exprimer pour raconter et transmettre une histoire. Le sculpteur lui consacrera toute son énergie pendant plusieurs mois, voire plusieurs années. C’est exactement ce qu’ont fait les sculpteurs sur la falaise de Rocamadour, il y a plusieurs siècles avant la christianisation de leur sanctuaire.
 
Restaurations des sanctuaires
de Rocamadour au XIXe siècle

 
Témoignages des contemporains
et point de vue des archéologues et historiens

 
Il est intéressant de connaître le point de vue des contemporains de ces restaurations de la fin du XIXe siècle, à travers le témoignage d’archéologues et historiens.
 
Ernest Rupin (3) avait une vingtaine d’années au plus fort de ces "transformations". D’un point de vue historique, son témoignage est précieux. En plus de son point de vue, il nous donne celui de Jules de Verneilh.
Dans son « Étude historique et archéologique de Rocamadour » (4), il écrit p.7-8 :
 
« De nombreuses constructions ont été faites à Roc-Amadour depuis quelques années. Les vieilles dalles qui recouvraient les églises et qui s’harmonisaient si bien avec la nature du rocher ont été remplacées par des couvertures en ardoise et en zinc cannelé ; la pierre blanche et éclatante de Périgueux a été préférée, pour les restaurations, à la pierre du pays de couleur beaucoup plus sobre. Des sentiers, consolidés par des murs et des balustrades également en pierre blanche, sillonnent la montagne et détonnent d’une façon désagréable en enlevant au paysage tout ce qu’il avait de rustique et de pittoresque. Ces innovations sont-elles heureuses ? »
 
"Je crains que son œuvre ne finisse
par absorber l’œuvre de ses prédécesseurs...
"  Jules de Verneilh
 
Ernest Rupin poursuit : "Voici ce qu’écrivait à ce sujet, à M. de Caumont, dès 1865, Jules de Verneilh (5), un archéologue émérite dont personne ne peut contester l’autorité."
 
« M. l’abbé Caillau, auteur d’une Histoire de Roc-Amadour, gémissait, en 1834, sur l’état d’abandon et de ruine où se trouvait alors le lieu vénérable dont il décrivait avec amour les splendeurs passées, et il appelait de tous ses vœux une restauration. Ces vœux ont été exaucés, peut-être un peu plus qu’il ne l’eût désiré lui-même, et que ne le veulent en tout cas les ennemis instinctifs des restaurations à outrance : ainsi, l’église principale, composée de deux nefs séparées par une rangée de colonnes, a été entièrement peinte et dorée de la voûte au pavé ; sa crypte, qui servait jadis de paroisse, a eu le même sort ; la chapelle de la Vierge a été rebâtie et surmontée d’un campanile, couronné par une statue colossale de la Sainte Vierge en style essentiellement moderne. En outre de ces travaux, déjà considérables, des portes ont été refaites, des perrons, des balustrades de pierre, des autels ; bref, avant peu, le nouveau l’emportera sur l’ancien, et les vieilles murailles disparaîtront sous l’envahissante couche d’azur et de vermillon. »
« Je ne dis pas que ces restaurations aient été mal faites : à Dieu ne plaise ! le savant prêtre qui les dirige y déploie, avec beaucoup de zèle, un véritable talent d’architecte et de décorateur  1 ; mais je crains que son œuvre ne finisse par absorber l’œuvre de ses prédécesseurs, et je suis sûr, Monsieur, que vous regretterez avec moi que la loterie de Roc-Amadour 2 ait produit des sommes assez importantes pour favoriser à ce point une entreprise, dont j’apprécie les nécessités au point de vue du culte et des pèlerinages, que j’approuve en principe, mais dont l’exécution trop radicale choque à la fois mes instincts d’antiquaire et d’artiste 3 » .
 
Ernest Rupin reprend : "Les prévisions de Jules de Verneilh se réalisent malheureusement de plus en plus."

Notes au bas de la page 8
 
1  Il n’est pas possible d’adopter, sur ce point, l’opinion de Jules de Verneilh.
2  Les premières restaurations de Roc-Amadour ont été faites, par l’abbé Cheval, au moyen du produit d’une loterie organisée dans ce but.
3  Jules de Verneilh. Lettre à M. de Caumont sur une excursion en Sarladais et en Quercy. (Bull. monumental, 1865. p.585).

Remarque
 
Notons qu’Ernest Rupin ne semble pas partager l’opinion de Jules de Verneilh lorsqu’il qualifie l’abbé Cheval de talentueux décorateur. Pour ma part, je rejoins au moins sur un point l’opinion de Jules de Verneilh, lorsqu’il dit : « je crains que son œuvre ne finisse par absorber l’œuvre de ses prédécesseurs...  »
Mais en poussant un peu plus loin son raisonnement, je crains que le savant prêtre ait parachevé l’œuvre de ses prédécesseurs pour finir par ensevelir l’œuvre originale des premiers occupants du rocher qui avaient sculpté toute la falaise avant la christianisation du sanctuaire.
Lire ma page  les sculptures sur la falaise sont la clé des origines de Rocamadour

 
 
Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour
À l’époque de Louis-Philippe et de Napoléon III
 par Jean Rocacher
 
Jean Rocacher (1) n’est pas contemporain des restaurations de la fin du XIXe siècle à Rocamadour, mais en absence d’archives municipales pour cette période, son ouvrage sur ces restaurations (2) comble un vide important.
Le seul regret que nous pouvons avoir est lorsqu’il écrit (p. 7) « J’ai choisi de ne présenter que les travaux intéressant les sanctuaires, quoique d’autres chantiers comme ceux du château, des rampes, du Chemin de la croix ou de l’aménagement de la grande citerne du pèlerinage soient très significatifs du nouvel essor de Rocamadour au XIXe siècle. »...
 
C’est dommage et fort regrettable, il y aurait eu beaucoup à apprendre ; ces lieux ont été le théâtre de profondes transformations.
 
Les restaurations ont été entreprises et menées à leur terme sous la seule responsabilité des évêques de Cahors et plus particulièrement sous l’épiscopat de Jean Jacques David Bardou (1842-1863) qui refusa de se soumettre au contrôle de la Commission des Monuments Historiques (p. 55).
Au printemps de 1859, le Ministre de l’instruction publique et des Cultes décide de fermer les yeux sur les restaurations de Rocamadour et de classer l’affaire (p. 79).
 
Le chantier fut conduit par Jean-Baptiste Chevalt (6), un prêtre architecte beaucoup plus constructeur que restaurateur. Il faisait également office d’agent immobilier, il achetait à tour de bras, parcelles de terrain, anciennes bâtisses pour le compte de l’évêché qui l’employait afin d’étendre le domaine et son caractère privé (voir résumé de dix actes pp.193-194 : N° 522, 945 et 945bis, 548, 82, 284, 338, 77, 78, 405 et 248 du cadastre de Rocamadour). On en arrive même à se demander s’il lui restait du temps pour prier ?
 
"caché dans une profonde solitude,
au milieu d’horribles rochers..."

 
« J’ai visité récemment Rocamadour et j’ai reconnu, Monseigneur, que ce lieu vénéré, caché dans une profonde solitude, au milieu d’horribles rochers,... » p.13
 
On trouve ces propos de mauvais goût tenus par l’abbé Caillau (7) dans une lettre adressée à M. le Ministre de l’intérieur par M. Baumes, préfet du Lot, le 13 avril 1830 (8) pour lui exposer l’état du sanctuaire de Rocamadour et le prier d’accorder les fonds nécessaires aux réparations les plus urgentes (p.13-14).
 
Comment de tels propos, ô combien révélateurs,
peuvent-ils passer inaperçus ?

 
D’abord, il faut souligner que pour la première fois, nous rencontrons quelqu’un de spontané à Rocamadour et de profondément sincère. Au moment, où l’abbé Caillau découvre surpris, la présence de formes déconcertantes dans la roche, il laisse échapper un sentiment refoulé par tant d’autres à Rocamadour particulièrement.
 
Il est facile de comprendre que l’abbé Caillau est horrifié à la vue des représentations sculptées qu’il découvre sur la falaise de Rocamadour.
 
On surprend l’abbé Chevalt dans une correspondance avec l’évêque de Cahors le 7 avril 1859 (p.94), faire une remarque du même genre dans un lieu qu’il dit restaurer : « passage bien pittoresque mais bien effrayant. ».
 
On peut ensuite se demander pourquoi l’abbé Caillau, prêtre parisien, s’entête à vouloir faire restaurer des bâtiments délabrés dans un endroit qu’il juge horrible ?
 
 
Château de Rocamadour
Le 11 septembre 1836, l’abbé Caillau trouve miraculeusement de l’argent, non pas pour sauver des ruines le sanctuaire de Rocamadour, mais pour s’acheter le château avec ses dépendances (en état de ruines) mis en vente aux enchères par la mairie de Rocamadour. (p.35)
 


Copyright © Charly Senet 2014 - Château construit sur le plateau rocheux de la falaise de Rocamadour

Non seulement l’abbé Caillau va reconstruire le château, mais il va l’agrandir en construisant de nouveaux bâtiments adossés au château que l’on voit à gauche sur la photo ci-dessus.
Où a-t-il trouvé cet argent ?
On avait cru comprendre qu’il s’inquiétait pour l’état de délabrement du sanctuaire !
Alors, dans ce cas, pourquoi n’a-t-il pas utilisé cet argent pour la cause qu’il prétendait défendre ?
 
Le 7 mai 1850, l’évêque de Cahors Jean Jacques David Bardou, lui rachète le château (p.31-36). C’est ce même évêque qui, le 30 mai 1844 adressait une lettre à l’épouse de Louis-Philippe, Marie-Amélie de Bourbon, fille de Ferdinand IV, roi de Naples pour obtenir des fonds pour réparer les marches du grand escalier. Une demande qui provoqua la surprise des hauts fonctionnaires qui ne comprenaient pas que l’on puisse réparer les escaliers de Rocamadour avant de s’occuper des sanctuaires. (p.21-22.)
 
 
"l’histoire de Rocamadour a été écrite dans la joie et l’espérance,
mais aussi, dans les larmes, la souffrance et le sang."
 (p. 6)
 
Ces restaurations ont aussi été à l’origine de nombreux conflits entre le prêtre conduisant les travaux et l’évêché de Cahors qui le soutient, envers certains habitants et la mairie de Rocamadour. Des éboulements de terrain ne feront qu’aggraver les tensions entre les divers protagonistes.
 
"Ce qui devait arriver
finit par arriver..."
 (p.229.)
 
1865 : « Ce qui devait arriver finit par arriver : le 3 février, les terres de la combe du nord des églises se détachèrent d’un coup et se mirent à dégringoler dans un épouvantable fracas sur la grange et la cave de l’aubergiste Jean-Louis Lafon. »
 
« Alors va commencer une longue période de « bras de fer » entre la commune et le pèlerinage, ... »
 
"L’abbé Chevalt a-t-il entrepris
la restauration à contrecœur ?"
(p.287.)
 
1869 :
 
« Les Archives de la Maison des Chapelains de Rocamadour (AMC) conservent une importante série de dessins non datés de l’abbé Chevalt relatifs à la reconstruction du palais abbatial et de la chapelle Saint-Jean- Baptiste. Ces projets, rehaussés d’aquarelle sont numérotés de 1 à 36. Les feuilles nº24, 25, 26 et 29 présentant les plans et élévations de cette chapelle permettent de voir qu’il a synchronisé la reconstruction totale de cet oratoire avec celle du palais. Mais par ailleurs, il faut constater qu’il a relevé avec un soin particulier le plan et les chiquots de murs des ruines du palais... »
 
« L’abbé Chevalt a-t-il entrepris la restauration à contrecœur ? Avait-il des projets de sauvegarde des ruines ? ... L’écho de ses hésitations se retrouve dans la description qu’il donne de cette bâtisse (cf. 3e édition de son Guide du pèlerin à Roc-Amadour, SD., approuvée par Mgr Grimardias, p.24-25). Mais il se devait d’obéir à l’évêque de Cahors. »
 
« La reconstruction (palais abbatial) se prolongea durant la guerre de 1870 et ne fut vraisemblablement terminée qu’à la fin de l’été 1872. »
 
 
"l’audacieux architecte
fut précipité d’un échafaudage..."
 (p.287.)
 
« Au mois d’août de cette année-là (*) se produisit un grave accident de travail sur son chantier (**). L’abbé Poujade, un de ses amis, a simplement noté (Courrier de Tarn-et-Garonne du 28 novembre 1876) :
 
Un jour, l’audacieux architecte fut précipité d’un échafaudage élevé ; il ne se sauva que par miracle. Cette chute ne demeura pourtant pas inoffensive pour lui. Il se sentit atteint dans sa vigueur normale. Il dut même quitter Rocamadour et se retirer à Montauban, attiré par un groupe d’amis dévoués."  »
 
"un des ouvriers eut moins de chance
sa mort est laconiquement signalée..."
 (p.287.)
 
« Malheureusement, un des ouvriers qui se trouvait sur le même échafaudage eut moins de chance : sa mort est laconiquement signalée par cette mention du Livre des comptes du pèlerinage : "  Payé à la veuve de l’ouvrier tué : 50 F. " »
 
Pour se faire une idée précise de la valeur d’une vie estimée par l’évêché de Cahors à cette époque, il suffit de comparer les 50 F donnés à la pauvre veuve de l’ouvrier tué et beaucoup moins chanceux que l’abbé Chevalt.
En 1865, la valeur de cette vie équivalait au prix d’une barrique de vin pleine écrasée, mais pouvant être réparée.
La valeur estimée à 40 F de cette barrique accidentée est extraite des dommages estimatifs soufferts par M. Lafon (aubergiste) dans son procès engagé contre l’évêché suite à l’éboulement de terrain survenu le 3 février 1865 à Rocamadour occasionnant des dégâts sur sa propriété. (p.237.)
 

On relève de nombreuses incohérences
autour de cet accident mortel
 
Date ?
 
(*) De quelle année s’agit-il exactement ?
 
De la page 287 à la page 299, Jean Rocacher mentionne des évènements qui se sont déroulés en 1869. Tous les évènements en dehors de cette année 1869 sont clairement datés dans toutes les pages (287 à 299).
 
(**) Certes, il s’agissait du chantier dirigé par l’abbé Chevalt, mais :
 
Le 9 juin 1869, c’est l’abbé Delmas qui rend compte à l’évêque de Cahors Grimardias de ce qui se passe à Rocamadour (p.288-289), alors que jusque fin décembre 1868, on voit un abbé Chevalt très actif et qui continu à rendre compte à l’évêque de Cahors de tout ce qui concerne le chantier de Rocamadour avec tous les problèmes qu’il rencontre sur la commune et particulièrement les sérieux problèmes d’éboulements (p. 272-286).
 
Dans sa lettre adressée à l’évêque de Cahors Grimardias, l’abbé Delmas lui dit aussi avoir envoyé la veille (8 juin 1869) des plans remis par l’abbé Messabie (p.288) supposé n’être venu travailler avec l’abbé Chevalt qu’à partir de 1871 (p.300) et appelé à prendre la direction des travaux à la fin de l’année 1872 (p.300).
 
Circonstances ?
 
La prudence avec laquelle Jean Rocacher mentionne ce grave évènement qui se produisit sur le chantier de "restauration" est compréhensive, mais néanmoins courageux. Nombreux sont ceux qui ont préféré le taire et plus nombreux encore sont ceux qui auraient préféré qu’il le taise.
 
Chacun aura noté je l’espère, le terme employé par l’abbé Poujade : « fut précipité ».
 
Il est parfaitement clair que l’architecte et l’ouvrier qui se trouvaient sur l’échafaudage ce jour là ont été victimes de faits extrêmement graves, beaucoup plus graves qu’un dramatique accident de chantier !
 
Nous savons par l’intermédiaire de l’abbé Poujade (p.287) qu’après son grave accident, l’audacieux architecte a été contraint de quitter Rocamadour. Quel sort a été réservé à la veuve ?
 
Des contradictions ?
 
Que devient l’abbé Chevalt après son grave accident ?
 
Jean Rocacher écrit p.287 :
 
« L’abbé Poujade, un de ses amis, a simplement noté (Courrier de Tarn-et-Garonne du 28 novembre 1876) : " Un jour, l’audacieux architecte fut précipité d’un échafaudage élevé ; il ne se sauva que par miracle. Cette chute ne demeura pourtant pas inoffensive pour lui. Il se sentit atteint dans sa vigueur normale. Il dut même quitter Rocamadour et se retirer à Montauban, attiré par un groupe d’amis dévoués. " »
 
Puis Jean Rocacher écrit quelques pages plus loin, à la page 300 du même ouvrage :
 
« À partir de décembre 1872, la direction des travaux du pèlerinage était assumé par un prêtre lotois qui travaillait sous la responsabilité de l’abbé Chevalt depuis plus d’un an, l’abbé Massadie. L’abbé Chevalt, de son côté, regagnait son diocèse d’origine où l’attendaient d’autres tâches. »
 
C’est absolument abasourdissant ! On a l’impression qu’il ne s’est jamais rien passé ?
 
Nous sommes encore une fois surpris en lisant cet extrait de la biographie de l’abbé Chevalt réalisée par Elisabeth Sebban (9) en 2009.
 
  • En 1872, suite à une grave chute d’un échafaudage de vingt mètres survenue sur le chantier de Rocamadour, il réintègre le diocèse de Montauban auprès de son ami Fernand Pottier (fondateur de la Société archéologique de Tarn-et-Garonne) ;
  • En 1872, crée la rubrique religieuse du Bulletin Catholique de Montauban ;
  • En 1873, réalise les plans du couvent de Sainte-Claire pour la congrégation des Soeurs de la Sainte-Famille à Villefranche-de-Rouergue (12) ;
  • En 1874, conduit les travaux d’agrandissement et d’architecture de l’église Saint-Barthélémy à Cressensac (46) ;
  • Le 7 juin 1875, désigné chanoine honoraire sans fonction de la cathédrale de Montauban par Mgr Legain ;
  • De 1875 à 1876, dirige les travaux de la chapelle privée du Collège Saint-Théodard à Montauban ;
  • Le 26 novembre 1876, décède à 19 heures à son domicile privé, 94 rue de Lacapelle à Montauban ;
 
Remarque : Pour un homme âgé de 55 ans au moment des faits (août 1872 ?), et comme le dit l’abbé Poujade, un homme qui fut précipité d’un échafaudage élevé et se sentit atteint dans sa vigueur normale. Il dut même quitter Rocamadour et se retirer à Montauban. Une grave chute de vingt mètres de hauteur dit Elisabeth Sebban en 2009.
Faire une telle chute sur un chantier tel que Rocamadour où il n’y a que rocaille aux alentours. Il y a de quoi être étonné par l’incohérence et l’invraisemblance des faits rapportés.
 
Si on prend en considération la gravité de la chute et qu’il y a eu un mort dans l’accident, on peut déjà admettre qu’il n’y a pas eu de miracle. Si on prend ensuite en considération les conditions médicales de l’époque, elles étaient loin en 1872, d’être celles que nous connaissons aujourd’hui. Et si on ajoute à tout cela, que les archives de Rocamadour pour le XIXe siècle ont disparu mystérieusement, il est difficile de ne pas s’interroger sur ce qui s’est réellement passé ce jour-là ? Ne connaîtrons-nous vraisemblablement jamais la Vérité ?
 
Maintenant, après avoir vécu ce grave accident et souffert dans sa chair comme n’importe quel mortel, comment ne pas se poser des questions sur tout ce qu’on prête à l’abbé Chevalt d’avoir accompli entre son grave accident (août 1872 ?) et son décès en novembre 1876 ?
 
Sans remettre en cause le travail réalisé par Elisabeth Sebban en 2009 pour rédiger la biographie de l’abbé Chevalt, comment ne pas s’interroger sur la nature de ses sources ?
 
Jean Rocacher écrit lui-même à propos de la biographie de Jean-Baptiste Chevalt à la page 6 :
 
« Jean-Baptiste Chevalt (1817-1876), séduisante personnalité d’archéologue, d’architecte et de peintre dont la biographie n’a pas encore été sérieusement établie  »
 
Cette remarque en introduction passerait presque inaperçue, mais elle est loin d’être anodine. Jean Rocacher a eu accès à de nombreux documents : Archives Diocésaines de Cahors, Archives de la Maison des Chapelains de Rocamadour, Archives Nationales de Paris entre autres. Ne nous invite-il pas, en connaissance de cause, à sérieusement y réfléchir ?

 
"il faut encore se tourner vers les Amadouriens
et entendre leur colère s’exprimer..."
 (p.287-288.)
 
« Pour en finir avec les restaurations de la cité religieuse, il faut encore se tourner vers les Amadouriens et entendre leur colère s’exprimer de nouveau dans les délibérations du conseil municipal —  seules épaves du vaste naufrage des archives municipales du XIXe siècle et seuls témoins, jusqu’à plus ample informé, des tensions qu’avaient aggravé le sinistre du 3 février 1865 et le procès de Gourdon. » (p.288.)
 
« Nous retrouverons l’écho dans les lignes qu’adressait l’abbé Delmas, supérieur du Pèlerinage, à Mgr Grimardias (9 juin) : «Monseigneur, encore de mauvaises nouvelles et de nouvelles folies de la part de notre conseil municipal ! Hier, il s’est réuni et, contre toute attente, il a représenté la question communale touchant nos constructions. C’est Delnaud, toujours Delnaud, qui est l’âme de cette nouvelle campagne. » (p.288.)
 
« La délibération que je vous envoie a été portée par Père de Figeac ; et c’est l’écriture de l’éternel Delnauld. » (p.288.)
 
"les loups
sont restés loups..."
 (p.288.)
 
« J’espérais que les opposants ne seraient plus en majorité. M. le maire le croyait comme moi, et vous voyez ce qu’il en est. Personne ne s’attendait à cette nouvelle manifestation ; quelques-uns des anciens signataires avaient promis qu’on ne les y prendrait plus, semblaient se montrer repentants et, au moment du vote, tout a changé : les loups sont restés loups. Cette population n’a ni franchise ni caractère. Je suis littéralement hors de moi à cause d’une semblable ingratitude, envers vous surtout et envers nous. Que faire ? J’espère, Monseigneur, que vous aviserez et vous me voyez prêt, cette fois, à faire ce que vous voudrez. La première démarche pouvait être une surprise, une ignorance,. Je l’ai cru... Cette fois, cela ne peut être qu’une méchanceté, une grossièreté... Le vrai caractère se révèle. Il y a donc ici une nouvelle conduite à tenir. Mais j’ai besoin de vos conseils pour ne rien faire d’imprudent ou qui vous déplaise : je crois que c’est le moment de surveiller notre affaire d’Agen. Si elle venait à se perdre, nos ennemis en triompheraient à notre très grand détriment. Le succès leur donnerait un grand crédit. Si nous la gagnons, au contraire, l’opposition ne s’en relèvera pas. Je prie donc Votre Grandeur d’employer toutes ses influences pour que l’affaire Joucla tourne à bien... » (p.288.)
 
Le 28 décembre 1869, la cour impériale d’Agen, confirmait le jugement de Gourdon du 3 mars 1868. L’évêché venait de perdre son procès en appel qui l’opposait à la mairie et au sieur Lafon au sujet des éboulements de terrain survenus le 3 février 1865 pendant les restaurations des sanctuaires à Rocamadour.











Notes et bibliographie
 


(1) Jean Rocacher (1928-2008). Né en 1928 à Tulle, diplômé de théologie. Membre titulaire en 1983 à la Société Archéologique du Midi de la France (S.A.M.F), il était aussi membre de l’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles Lettres. »
 
Pour en savoir plus sur  Jean Rocacher
 
(2) « Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour » paru en 1987. Auteur Jean Rocacher
 
     Supplément au Bulletin de Littérature Ecclésiastique. Institut Catholique de Toulouse. Chronique n°3-1987.
 
(3) Ernest Rupin (1845-1909). Né à Brive le 6 mai 1845. Archéologue, historien de l’art et historien local.
 
Pour en savoir plus sur  Ernest Rupin
 
(4) « Ernest Rupin  ROC-AMADOUR. Étude historique et archéologique. Préface de M. le Cte Robert de LASTERYRIE, Membre de l’Institut. PARIS, Librairie G. BARANGER Fils, 5, Rue des Saints-Pères, 5. 1904. Édition originale 416 p.
 
    « Rocamadour, Étude historique et archéologique Ernest Rupin. Le Livre d’histoire. Monographie des villes et villages de France. Préface de M. le comte Robert de Lasteyrie, Membre de l’Institut, (2001) Fac-similé de l’édition originale qui parut en 1904, 416 p. 1ère réédition. Exemplaire numéroté.
 
(5) Jules de Verneilh (1823-1899). Originaire de Piégut-Pluviers dans le Nontronnais (Dordogne), débute sa carrière comme dessinateur et aquaforiste puis archéologue en 1864.
 
Pour en savoir plus sur  Jules de Verneilh
 
(6) Jean-Baptiste Chevalt (1817-1876), prêtre du diocèse de Montauban et curé de Cazes-Mondenard dirige les travaux des restaurations des sanctuaires de Rocamadour entre 1858 et 1872 à la demande de Mgr Bardou, évêque de Cahors.
On rencontre deux écritures de son nom : Chevalt et Cheval, avec et sans le "t" final. Une coquetterie selon Jean Rocacher.
L’abbé Chevalt est né le 6 août 1817 à Bagnères-de-Luchon et il est décédé le 26 novembre 1876 à Montauban
 
(7) « Armand-Benjamin Caillau (1794-1850) était prêtre de la Société des Missions de France et directeur de la maison Sainte-Geneviève de Paris. La Société, dissoute par la révolution de juillet 1830, se reconstitua ultérieurement sous le nom de Prêtres de la Miséricorde. »  - « Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour p.312 note (3)  »
 
(8) « La lettre du 13 avril 1830 se fait l’écho d’un autre document disparu : un rapport établi par l’abbé Caillau sur l’état de dégradation des sanctuaires de Rocamadour et transmis au Ministère de l’intérieur par le canal du Préfet du Lot. » -  « Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour » p.12
 
« Un ouvrage publié plus tard nous apprendra dans quelles circonstances le prêtre parisien découvrit Rocamadour et s’attacha passionnément à la relance du pèlerinage : appelé pour une série de prédications à Figeac et dans le Lot en 1829, il tomba sérieusement malade et se rendit à Rocamadour. Ses forces revenues, l’abbé Caillau en rendit grâce à Notre-Dame de Rocamadour et revint en prédicateur et en pèlerin jusqu’à la fin de sa vie. » -  « Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour » p.12
 
« Le 29 juillet 1830, les révolutionnaires pillaient la maison Sainte-Geneviève de Paris et l’abbé Caillau partait se réfugier à Rome. » -« Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour  » p.17.
 
(9) « Biographie de l’abbé Jean-Baptiste, Pierre CHEVAL (1817-1876) réalisée et rédigée par Elisabeth Sebban © œuvre déposée par l’auteur, à la SGDL le 12/10/2009 sous le n° 2009-10-0123 »
Pour en savoir plus sur l’abbé Cheval(t), lire l’article publié sur le site catholique de Montauban (dernière consultation le 18 décembre 2014) :   http://catholique-montauban.cef.fr/rubriques/gauche/histoire-et-patrimoine/personnalites/jean-baptiste-cheva
 













Charly Senet Auteur du livre Angélus
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Dépôt:  Étude Notariale 2010 - Académie des Sciences Paris 2011, 2012
Dépôt Étude archéologique Académie des Sciences Paris:  1er et 2e sem 2012, 2014